Le grand rendez-vous hivernal des musiques buissonnières a fermé ses portes dimanche en administrant à nouveau la preuve qu’il faut savoir se rendre à Rennes et braver les premiers froids pour défricher les nouvelles tendances musicales, projets à dominante rock et électro où viennent se fondre tous les genres et tous les continents. Parmi les promesses tenues, notons celle des publics. Grâce à sa forme associative, le festival bien ancré dans la métropole rennaise déploie à l’année des programmes d’action culturelle qui fédèrent quinquas ou sexas rockers, jeunes curieux, festivaliers accomplis, minots et ados. Ils se sont tous mêlés dans les différents lieux qui ont accueilli ces rencontres foisonnantes, notamment l’Opéra de Rennes pour la création saisissante de Raùl Refree. Après quatre jours et trois nuits d’exploration, petite sélection de choses vues et entendus.
En commençant par Yamê. La création du festival – fameuse depuis qu’elle a vu passer Stromae, Jeanne Added ou Zaho de Sagazan l’année dernière – lui était confiée, au théâtre de l’Aire libre dans la banlieue rennaise. Spectacle soigné et mise en scène dynamique pour un concert plus soul que rap. Le chanteur pianiste, accompagné de trois choristes, d’un batteur et d’un DJ, a affirmé son penchant pour le chant et assumé ses embardées jazzy, avec un flow argotique inénarrable. Il aime son piano et ça se voit, il aime chanter et ça s’entend. Du talent à revendre et une intelligence certaine pour cet artiste en pleine éclosion, dont on se demande avec appétit quelle direction va prendre sa musique riche et transversale. À suivre de près…
Le label suisse Bongo Joe à l’honneur
En Suisse, on ne fait pas que regarder les horloges tourner, on défriche et on crée. Le pays était à l’honneur de ces Trans musicales avec, dès l’ouverture, mercredi soir, une soirée dédiée à la communauté genevoise Bongo Joe, label, disquaire, café et pépinière de talents qui comptait sept groupes programmés (Yalla Miku, Nusantara Beat, Bound By Endogamy et La Brucelle, Ndox Électrique, Citron Citron, Blanco Teta). Autant de projets musicaux qui s’attachent à faire vivre des scènes nouvelles et vibrer des échos transnationaux. Nous n’avons – malheureusement – pas pu tous les voir, mais Ndox Électrique, nous a comblé. Avec ce groupe à effectifs pléthoriques, l’Afrique de Ouest part à la rencontre du post-rock, guitares fracassantes sur chants traditionnels, et ça marche formidablement. Citron Citron ont livré une pop minimaliste et baroque, à dominante électro pleine de sonorités surprenantes, sans oublier, au détour d’un morceau nommé Violence de ton silence, de condamner celui des états occidentaux sur la situation faite aux Palestiniens.
On quitte Bongo Joe, mais on reste en Suisse avec Annie Taylor qui n’a rien à voir avec Swift ni Elisabeth. C’est le nom d’un groupe emmené par la puissante Gini Jungi qui nous a gratifiés d’un rock de facture classique, mais diablement efficace quand il est porté par un guitariste de cette trempe, aussi bon rythmiquement que dans des solos échevelés. Suisse toujours, avec Anna Erahrd et l’agréable sensation qu’un rock-pop lo-fi et malicieux est toujours d’actualité. Avec sa voix féline, elle a des choses à dire et les chante avec talent.
The Silver Lines, groupe de rock anglais volcanique
Car le rock vit toujours et les Trans musicales ne l’oublient pas. Depuis les Buzzcocks, on connaît la recette pop-punk, mais il y a toujours un groupe anglais pour l’enrichir. La relève pourrait bien s’appeler The Silver Lines, qui a donné un concert volcanique avec un alignement classique basse/batterie/guitare/chant. Le groupe de Birmingham est d’une efficacité redoutable : mise en place parfaite, riffs acérés, compositions précises et présence désinvolte. C’est so british et ça envoie.
L’Irlandaise Bambie Thug a endossé et métamorphosé les codes pop en fée gothique avec une électro pop féministe et horrifique qui n’hésite pas à s’aventurer vers le trash. Hyper pop ou hyper punk ? En tout cas hyper bien. Twende Pamoja, est emmené par le violoniste Théo Ceccaldi, victoire du jazz en 2017 qui multiplie les collaborations avec les artistes africains. Ici, avec une chanteuse tanzanienne (Kadilida) et nigériane (Aunty Rayzor), il a laissé parler son violon, pincé ou frotté, sur des beats afro ou du singeli (musique électro tanzanienne). Une fusion savoureuse.
Heavenphetamine est une découverte saisissante. Le combo nippo-ukrainien, (et oui, ça existe) était en tout point remarquable. La partie japonaise à la batterie et au clavier, la partie ukrainienne à la guitare et à la flûte. Ça frappait dur sur les fûts pour cette musique chamanique, rock opératique et bluesy, qui fait la part belle une flûte transnationale que l’on imagine aussi bien souffler sur le Dniepr que le mont Fuji. Belle sensation avec Mokhtar, groupe rennais à souffleurs, avec basson et saxophone sur assise funk. Entre rythmes éthiopiens et klezmer, ça groove dans le grave.
Vocoder, arpèges de guitare et singeli
L’Auto-Tune c’est comme la cornemuse, agaçant jusqu’à ce qu’on sache en faire bon usage. Gustav, duo rennais qui envoie comme quatre, en fait ici la démonstration, sur guitares lacérées et beats puissant. Une idée de ce que pourrait être le rock du futur. Gwenifer Raymond est une guitariste galloise prodigieuse qui dessine sur six cordes des arpèges diaboliques et martèle du pouce une transe hypnotique. On appelle cela l’« American primitive » et John Fahey était son prophète. Si elle s’en inspire, c’est sans redite et avec beaucoup de grâce.
Artiste aveugle de naissance, l’Américaine Britanny Davis est arrivé tout sourire, entourée de deux guitaristes en cow-boys excentriques et pailletés. Elle réalisait sa première européenne dans un concert funk-soul particulièrement entraînant. Le rennais Judgitzu se produisait dans la Greenroom, dédiée aux musiques électroniques. Scéniquement convaincant, l’ethnomusicologue punk est devenu une référence en singeli, musique électronique ultra-rapide qui connaît un immense engouement sur le continent africain. On reprenait ses esprits avec le chanteur reggae britannique Joe Yorke. Avec sa belle voix de fausset à la Jimmy Sommerville, il calmait le tempo. Mais le reggae, musique rythmiquement complexe, c’est toujours mieux avec basse et batterie.
Toutes les nuances de la musique électro
Côté électro, la brésilienne King Kami a envoyé un DJ set rempli d’effets visuels trash avec une techno teintée de kuduro (musique angolaise) et autres styles dansants latino-américains qui ont fait vibrer les murs du hangar. Une découverte étonnante. Puis c’était le tour du très attendu Jacques. L’artiste français, célèbre pour sa coiffure audacieuse (rasé au centre, long sur les côtés) et son style bruitiste – caractérisé par l’emploi d’objets du quotidien pour créer mélodies et rythmes électro – a livré un set sympathique ponctué d’un générateur de phrases aléatoires.
Kabeaushé, chanteur kényan, était accompagné d’un DJ pour déployer sa pop afro filtrée par une transe électro. Etonnant mais un peu trop rudimentaire pour emporter l’adhésion. Excellente surprise, par contre, avec le producteur belge Le Motel (connu pour ses collaborations avec Roméo Elvis), qui accompagnait le rappeur nigérian Magugu, figure du « Pidgin Rap » (mêlant langue nigériane et anglaise). Un show maîtrisé et rempli d’interactions avec le public, les flows rapides de Magugu s’imbriquant harmonieusement avec les productions soignées aux lourdes basses de son collaborateur belge. Et si l’on voulait danser, c’était avec Mind Against, groupe italien déjà bien connu des amateurs de techno house, qui prodigue on ne sait commun des sons cristallins à impact physique.
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