Qui a dit que le blues était passé de mode ? Visiblement, il a encore de beaux jours devant lui. Même en 2023, ce genre musical remplit des salles et fait vendre de merveilleux disques. Voici notre sélection d’albums blues sortis cette année et qui feront le bonheur des mélomanes à Noël.
1 La valeur sûre : Popa Chubby
Le géant new-yorkais roule sa bosse depuis plus de 30 ans. Un Américain qui n’a pas sa langue dans sa poche et qui propage le message du blues à travers des riffs puissants, une voix hargneuse, et une guitare qui ne l’est pas moins. Toujours très actif en matière de sorties d’albums, son dernier opus arrivé dans les bacs en septembre est un live enregistré dans son fief de la grosse pomme.
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« Cet album est une reformation à bien des égards » déclare Popa Chubby. « J’ai eu l’occasion de renouer avec mon allié de longue date et bassiste extraordinaire Mike Merritt et enregistrer dans mon vieux studio Manny’s Car Wash Blues Club avec Glen Forrest. Avoir Mile Dimeo aux claviers fut la cerise sur le gâteau. Ajoutez Stefano Giudici à la batterie et vous obtenez du blues rock bien heavy ! » Effectivement, si vous aimez les longs solos de guitare en fusion, et quand le blues vire au rock en acier trempé, ce disque est pour vous.
Et pour voir Popa Chubby sur scène, notez qu’il viendra en France en 2024, notamment à Paris, Lille, Clermont-Ferrand, Strasbourg, Nancy, Aurillac ou encore Le Puy-en-Velay. Toutes les dates sur le site officiel.
2 Le vétéran : Mike Vernon
Le « Chicago Blues » s’est importé en Europe durant les sixties dans un mouvement qu’on a appelé le « British Blues Boom ». Une vague portée par des groupes comme les Rollings Stones, les Animals ou les Yardbirds, mais aussi des animateurs radio tels Alexis Korner ou des producteurs à l’instar de Mike Vernon. Créateur du label Blue Horizon, il fait figure de découvreur-producteur-collaborateur de quelques projets majeurs par lesquels le mythique album des Bluesbreakers de John Mayall avec Eric Clapton, les deux premiers albums de Fleetwood Mac avec Peter Green, sans oublier des artistes américains tels que Otis Spann, Champion Jack Dupree et Elmore James. Autant dire que le blues, il connaît.
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Alors forcément, quand il décide de prendre lui-même le micro, accompagné par un groupe de « pistoleros » du blues ibérique nommé Cat Squirrel – le titre d’un morceau de Cream, ça ne peut que respirer le blues moite de Chicago, version londonienne. Des arrangements de facture classique qui perpétuent l’esprit du blues anglais.
CAT SQUIRREL Featuring Mike Vernon – « Blues What Am » – sorti le 6 octobre (Rock & Hall)
3 Le francophone : Paul Personne
Le blues se décline aussi dans la langue de Molière, et Paul Personne en est un de ses plus fidèles représentants. Mais pour son nouveau disque, double, notre bluesman hexagonal a choisi de réinterpréter des standards du patrimoine français à sa façon. Hallyday, Mitchell, Nougaro, Higelin, Polnareff, Souchon, Aufray, Bashung, Ferrer et bien d’autres se retrouvent ainsi mixés à la moulinette blues par un Paul Personne à la fois respectueux et inventif. Des chansons très connues trouvent une seconde jeunesse et une couleur bluesy inattendue, comme par exemple cette superbe reprise de Vertige de l’amour.
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Un projet qui n’a vu le jour que cette année, mais qui pourtant remonte à plusieurs décennies. « L’idée commence à germer au début des années 90 », explique le chanteur-guitariste. « J’y pensais de temps à autre mais je rangeais ça au fond d’un tiroir, ce n’était pas le moment. Il a fallu que l’être humain en fasse encore des siennes avec cet horrible virus et ce confinement obligatoire pour qu’une nouvelle envie se fasse sentir. »
Après son précédent album Funambule (ou Tentative de survie en milieu hostile) sorti en 2019, Paul Personne s’offre ici une récréation musicale et rend hommage aux personnalités qu’il a eu la chance de croiser sur sa route. Et comme toujours, l’artiste discret le fait avec sincérité et passion. « Dans un projet comme celui-là, il ne faut pas trop réfléchir et analyser. L’improvisation et la spontanéité sont toujours les meilleures alliées. » Des dédicaces qui nous font redécouvrir des chansons que l’on croyait connaître sous tous les angles. Et comme le dit Paul Personne lui-même : « ce qui est bien avec les reprises, c’est que ça ne donne qu’une envie… Réécouter les originaux ! »
4 Les frenchies ruraux : The Marshals
Le blues ne se joue qu’aux Etats-Unis ? Bien sûr que non. Le trio The Marshals nous démontre qu’il peut aussi s’éclore dans l’Allier. Et l’écrin du massif central français leur a donné l’inspiration pour produire un blues rural. Le delta du Mississippi rejoint ici la fameuse diagonale du vide hexagonale raillée par les citadins. Une guitare, un harmonica et une batterie qui accompagnent un chant habité.
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La musique est sans fioritures et cherche à capter l’essence même du blues, plutôt que l’esbroufe virtuose. Les riffs lancinants et la tonalité constante de Mi instaurent dans ces neuf morceaux une ambiance digne du sud américain. Les terres arides françaises ont elles aussi quelque chose à raconter et The Marshals réitèrent leur choix d’un lieu singulier. Après Les Courriers et les Bruyères, c’est au Ptit Cham, non loin de Sancy dans le parc des volcans d’Auvergne, que le trio a enregistré son dernier disque. Huit compositions originales du chanteur-guitariste et une reprise de Tony Joe White, Elements and things, histoire de conserver ce lien indéfectible entre la France et l’Amérique.
THE MARSHALS – « Le Ptit Cham Session » – sorti le 19 mai (Flower Coast / Absilone)
5 Le Français jazzy : Dr. Sugar
Encore un bluesman hexagonal en la personne de Dr. Sugar, de son vrai nom Pierre Citerne. Musicien auteur-compositeur inspiré par Ry Cooder et amoureux des musiques nées dans le delta du Mississipi, il a fondé les Marvellous Pig Noise en 1996. Après douze ans d’existence, puis la création du groupe Hush, des collaborations avec entre autres Mathis Haug ou la chanteuse soul anglaise Jilly Riley, et enfin l’aventure en 2022 avec le groupe électro-acoustique Sugarcane, le voilà maintenant en solo pour ce premier opus sous le nom de Dr. Sugar.
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On trouve neuf titres en anglais et en un français, mais tous respirent bon la Louisiane, les rives du Mississippi, et le parfum jazzy de la Nouvelle Orléans dès le morceau d’ouverture. Un disque produit près de Montpellier par Nicolas Sarran, batteur de Red Beans & Pepper Sauce, et qui assure également les percussions sur l’album.
DR SUGAR – « These Words » – sorti le 13 septembre (Rock & Hall)
6 Le brut et sauvage : The Blue-Footed Boobies
Ces Marseillais « fous à pieds bleus » (traduction de blue-footed boobies) ont choisi de monter sur scène en chaussures bleues. C’est à ça qu’on les reconnaît désormais. Ici, l’inspiration semble clairement venir des références du genre John Lee Hooker et R.L. Burnside, mais surtout plus proche de nous des barbus de ZZ Top, autodérision comprise. La voix rugueuse qui évoque instantanément Billy Gibbons est accompagnée par une rythmique sauvage, primale, brute de décoffrage. Le single Buggy aurait presque des airs du mythique La Grange.
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Le quatuor est constitué de Ronan, auteur-compositeur-guitariste et également « One Man Band » dans une autre vie, de l’harmoniciste Marko Balland, qui accompagne Sanseverino depuis 2017, du batteur Guillaume Dupré, fondateur de feu ETHS groupe phare de la scène metal française, et du bassiste Pascal Blanc dont le curiculum vitae compte des collaborations avec des artistes tels que Soprano et Nolwenn Leroy sans oublier des projets jazz comme 3 In A Box. Autant dire qu’avec ces quatre-là, le blues est au carrefour de multiples influences.
THE BLUE FOOTED BOOBIES – sorti le 27 octobre (Rock & Hall)
7 Le tendance soul-rock : Luc Blackstone
Le bassiste et chanteur Luc Blackstone qui officie notamment au sein de la reformation de Ganafoul joue aussi un blues-rock funky avec son propre groupe et vient de sortir son nouvel album, autoproduit. Le morceau titre qui ouvre le disque sonne très pop-rock, mais les sept autres morceaux regorgent de groove chaloupé aux accents soul et rhythm and blues invitant à se déhancher.
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Des cuivres chaleureux, une voix qui ne l’est pas moins, des rythmes qui alternent funk et shuffle. Et le pur blues n’est jamais loin avec un titre comme You’re driving me crazy ou la version live endiablée de I’m walking. Sur ce disque plus hétéroclite que son précédent, Luc Blakstone n’hésite à mêler blues avec pop, rock, soul et même parfois jazz. C’est là qu’on s’aperçoit que cette musique plus que centenaire n’en finit pas d’influencer encore et toujours les courants actuels.
LUC BLACKSTONE – « I’m coming » – sorti le 15 octobre (autoproduit)
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