LES HABITS DU DIMANCHE – De 1994 à 2007, la journaliste vedette a été le visage de la politique sur France 3. Son trio avec Serge July et Philippe Alexandre a marqué les esprits.
La politique, le dimanche c’est sacré. Ministres, députés, maires, porte-parole rompent la monotonie d’un week-end familial pour ferrailler à la télé ou à la radio. Il y a une époque où le match se jouait aussi entre journalistes. Dans les années 1990, alors que «L’heure de la vérité» de François-Henri de Virieu est en perte de vitesse, deux journalistes, talentueuses et iconiques, s’affrontent. À 19 heures, Anne Sinclair est la grande prêtresse du monde médiatico-politique. Son «7 sur 7» cartonne sur TF1, les scoops s’accumulent et les parts d’audience s’affolent. Après avoir régné sur le 20 Heures d’Antenne 2, la reine Christine Ockrent débarque sur France 3 le dimanche en 1994.
«Dimanche soir» est l’antithèse de «7 sur 7». Au générique nerveux et électro de l’émission de TF1, l’intro musicale du programme de France 3 se veut jazzy à la limite du somnifère. Au plateau grandiose des nouveaux locaux de Boulogne-Billancourt fait face une petite table sobre des studios du service public. La brune Sinclair est seule face à un homme politique ; la blonde Ockrent est accompagnée par deux piliers de la presse, Serge July et le regretté Philippe Alexandre. Après l’entretien, la journaliste et ses deux acolytes débattent de l’actualité politique en toute décontraction. July et Alexandre se connaissent depuis trente ans et ont déjà participé, ensemble, à une émission sur TF1. Ils s’affrontent en toute cordialité : July solide sur sa gauche, Alexandre à l’aise sur sa droite. L’esprit est bon enfant. «Le charme de l’émission, c’est que ce n’est pas préparé du tout», explique l’éditorialiste de RTL sur le plateau de Michel Denisot sur Canal+ en 1995.
Poire et «caouètes»
Cette ambiance «café du commerce du dimanche soir» inspire les «Guignols de l’info». Dans plusieurs parodies, ils mettent en scène July et Alexandre complètement ivres, débattant des soubresauts de la vie politique entre une bonne poire et un bol de «caouètes». «Faut pas faire des mélanges», titube la marionnette d’Alexandre. «Mais tu veux tuer le métier à dire que l’élection n’est pas relancée. Si c’est pas relancé, on va parler de quoi pendant trois mois ?», s’insurgent contre Christine Ockrent les éditorialistes en latex. Ces sketchs prouvent que l’émission, malgré des audiences plus que modestes, devient une institution. Une institution qui s’essouffle. Philippe Alexandre, qui a quitté RTL en 1996, laisse sa place un an plus tard.
Fin de l’esprit punk
En 1999, Christine Ockrent installe son «France Europe Express» le dimanche soir. Le programme est moins punk – l’angle européen choisi ne laisse guère de place à la fantaisie ou la rigolade. Serge July semble amputé de son membre droit. Parler de politique européenne à près de 23 heures ne remplit pas la salle – ou le wagon bar, le décor de l’émission étant un train. «France Europe Express» est remplacé en 2007 par la dernière œuvre de la reine Christine, «Duels sur la trois». L’émission ne dure que cinq mois.
La nomination de Dominique Strauss-Kahn au poste de ministre des Finances du gouvernement de Lionel Jospin avait obligé Anne Sinclair à abandonner «7 sur 7». L’arrivée de Bernard Kouchner comme ministre des Affaires étrangères en 2007 ne pousse pas Christine Ockrent loin des écrans de télévision. Au contraire. En 2008, elle est nommée directrice générale de l’Audiovisuel extérieur de la France. D’une certaine façon, c’est tous les jours dimanche.
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